Les entreprises françaises sont satisfaites du marché hongrois, comme le montre le fait que nombre d’entre elles y investissent une grande partie de leurs bénéfices, tout en créant des emplois et de la valeur ajoutée en lançant de nouveaux investissements en Hongrie. C’est pourquoi il est important pour la Hongrie de continuer à axer sa politique économique sur l’attraction des investissements directs étrangers, notamment européens”, a déclaré Pascale Andreani, ambassadrice de France en Hongrie, dans une interview exclusive accordée à AzÜzlet.
– Comment voyez-vous l’évolution des relations commerciales franco-hongroises après l’épidémie de Covid?
– L’épidémie de COVID n’a pas vraiment altéré la relation bilatérale puisque l’on dénombre 2 547 ressortissants français enregistrés en Hongrie.
Les entreprises françaises sont un peu moins de 500 dans le pays, dont un tiers est issu du secteur des services. Le secteur de la distribution et des biens de consommation arrive en deuxième position et représente environ 24% des entreprises françaises. L’industrie et la construction représentent chacune un peu moins de 14% des entreprises françaises. Le solde se répartit entre le secteur automobile, la santé et le tourisme.
Au plan bilatéral, la France est le dixième partenaire de la Hongrie et représente 3,7% des échanges globaux, soit un chiffre pratiquement identique à celui de 2020. La France a été, pendant ce même exercice, la 7e destination des produits hongrois, avec une part de 4,2%, et s’est maintenue au 9e rang des fournisseurs de la Hongrie, ce qui montre bien que le Covid n’a pas eu d’impact significatif sur notre relation bilatérale.
– Quel est, selon vous, le plus grand atout des entreprises et de l’économie françaises?
– La France dispose d’une réelle attractivité. La meilleure preuve en est le baromètre d’Ernst & Young qui a consacré, en mai dernier et pour la troisième année consécutive, notre pays comme la première destination européenne des investissements étrangers. Les principaux atouts de la France se concentrent notamment dans l’industrie, grâce à notre énergie décarbonée et une main d’œuvre qualifiée. Bien sûr, rien n’est jamais acquis et nous avons défini cinq priorités pour que la France maintienne sa position concurrentielle dans l’économie mondiale :
- Soutenir les industries de haute technologie et d’innovation;
- Poursuivre les efforts de compétitivité fiscale;
- Améliorer la qualité et la valeur ajoutée du Made in France;
- Faciliter l’accès aux compétences;
- Permettre à la règlementation de suivre le rythme des ruptures technologiques, avec en particulier de forts enjeux environnementaux et de décarbonation de l’industrie.
– Au moment où le monde et l’économie mondiale pensaient qu’une période de paix et de prospérité était enfin arrivée, la guerre en Ukraine a considérablement modifié le scénario économique. Comment cela affecte-t-il l’économie française et les relations économiques franco-hongroises?
– L’économie française a été affectée comme la plupart des autres économies au monde par les conséquences de la guerre en Ukraine. Nous restons néanmoins optimistes pour 2022. L’activité économique devrait ralentir mais continuer à se développer. Le retour de l’inflation constitue aussi un phénomène important, mais qui a pu être partiellement maitrisé grâce aux mesures adoptées pour lutter contre la hausse des prix énergétiques. La Hongrie en subit d’ailleurs aussi les conséquences, ce qui a récemment conduit la Banque centrale à revoir nettement à la hausse ses anticipations d’inflation pour 2022.
Au plan de notre relation économique bilatérale, la guerre en Ukraine, comme le Covid, n’a pas infléchi la dynamique positive. Le chiffre d’affaires réalisé par les entreprises françaises en Hongrie reste substantiel et s’élève à un peu plus de 9 Mds €. Il est réalisé en grande partie par les sociétés industrielles. L’activité des entreprises françaises représente environ 6% de la production industrielle hors automobile du pays. Il faut souligner notamment l’arrivée récente de PME françaises qui trouvent ici une main d’œuvre qualifiée et au coût compétitif.
Par ailleurs, deux points méritent d’être rappelés :
- les 32 sociétés françaises qui sont présentes dans l’industrie automobile, secteur majeur de l’économie hongroise. Elles emploient plus de 6 000 salariés et réalisent un chiffre d’affaires supérieur à 2 Mds €, alors qu’elles ne représentent que 4% de l’emploi total du secteur, ce qui témoigne de leur forte productivité (27%).
- La représentation importante de la France dans le secteur hongrois de la santé. Sur les 5,1 Mds € de chiffre d’affaires global du secteur en Hongrie, environ un tiers est réalisé grâce à la présence française, et à nos 22 entreprises très productives.
– Selon vous, qu’est-ce qui est le plus intéressant pour les entreprises françaises sur le marché hongrois aujourd’hui et qu’est-ce qui devrait être modifié?
– Les entreprises françaises sont satisfaites du marché hongrois et une bonne partie d’entre elles choisissent d’y réinvestir une grande part de leurs profits. En outre, nos entrepreneurs continuent de lancer de nouveaux investissements en Hongrie. Ils sont source d’emplois et de valeur ajoutée pour le pays. Cependant, les récentes décisions de surtaxe pourraient conduire nos entreprises à en différer la réalisation. C’est pourquoi il est important que la Hongrie continue d’axer sa politique économique sur l’attraction des investissements directs étrangers, et européens en particulier, en se positionnant comme l’un des ateliers les plus compétitifs de la chaîne de valeur de l’industrie manufacturière.
– En observant les activités de CCI France Hongrie, il est clair qu’il existe encore un potentiel de coopération entre les entreprises françaises et hongroises. À votre avis, quels sont les domaines dans lesquels la coopération est la plus réaliste et ce qui peut être fait pour approfondir la coopération économique entre les entreprises.
– C’est en effet en partie le rôle de la CCIFH que de rapprocher les entreprises de nos deux pays grâce à ses réseaux et comme correspondant unique de la Team France Export en Hongrie. Mais la France est déjà très présente en Hongrie dans beaucoup de secteurs et notamment l’automobile, la construction, la distribution, l’industrie, la santé et les services financiers. La Hongrie offre de belles perspectives de développement et nous travaillons aussi de concert avec les agences hongroises spécialisées pour y accueillir davantage de sociétés françaises, notamment dans l’industrie et les services.
– L’un des grands perdants de l’épidémie de Covid est le tourisme, qui, outre le tourisme d’affaires, est aussi un facteur clé du développement et du renforcement des relations personnelles entre Français et Hongrois. Quand pensez-vous que le renouveau des voyages entre les deux pays sera de retour?
– Malgré le Covid, nous avons continué à travailler dans le domaine du tourisme, comme dans les autres. C’est ainsi que la tournée médiatique „Focus on France“, a fait son retour en présentiel à Budapest le 24 février. Cinq partenaires français s’étaient déplacés pour l’occasion : les offices de tourisme de Nice et de Ouest Corsica, la station alpine des Ménuires, le Château de Chenonceau et l’Abbaye de Fontevraud. Cela a notamment permis à 17 journalistes et influenceurs hongrois de se retrouver pour découvrir les grandes nouveautés France 2022 via un film promotionnel. En adéquation avec le Plan Destination France et les objectifs de la Présidence française de l’Union européenne, le tourisme durable a été l’un des thèmes phares de cette tournée médiatique.
On dénombrait avant la crise environ 200 000 séjours de touristes hongrois en France chaque année. Grâce à la forte reprise économique et à l’excellente connectivité aérienne, le marché hongrois représente plus que jamais une opportunité de croissance pour la destination France et l´ensemble de ses acteurs touristiques.
Zoltán Érsek M.